L’histoire qu’on va vous conter aujourd’hui est sans doute celle de l’un des plus gros ratés commercial et sportif du groupe PSA. Au cœur des années ’80, le rallye a la cote et la réglementation Groupe B plait au public. Audi, Lancia, Ford, Renault, Opel, les constructeurs affluent. Et alors que Peugeot investit les moyens nécessaires pour faire gagner sa 205 Turbo 16, Citroën déboule au Rallye de Monte-Carlo 1986 avec une BX 4TC qui a tout d’une aimable improvisation. Et comme la réglementation Groupe B de l’époque précise que l’auto de route servant de base à une utilisation en course doit être produite à 200 exemplaires, la marque aux chevrons a bon espoir de rapidement écouler le stock d’une voiture clairement sportive, voire exclusive.
Et cette auto, la voici ! La BX 4TC de route. A l’époque, la BX est le modèle phare de Citroën, qui a succédé à la GS et qui s’adresse à un public familial. Le souci, c’est que la BX n’est pas très sexy… Alors, en développant la version 4TC servant de base à la voiture de rallye, le constructeur français espère toucher une clientèle jeune et sportive.
Oui mais, car il y a évidemment un ‘mais’… Au moment d’entamer le projet 4TC, Citroën ne dispose pas des moyens nécessaires, contrairement à Peugeot pour sa 205. Résultat : on décide de faire du neuf avec du moins neuf, en se servant dans la banque d’organes de PSA. Le moteur est donc celui de la Peugeot 505 Turbo, d’origine Chrysler, la boîte de vitesses est celle de la Citroën SM, le pont arrière est également issu de la 505, les jantes de la CX GTi Turbo, etc., etc.
Et puis, si Audi a brillé sur la scène du rallye avec sa légendaire Quattro, c’est en positionnant le moteur avant de façon longitudinale. Ce qui se traduit sur la BX 4TC par un porte-à-faux gigantesque, qui a pour principal effet de pulvériser la ligne de la voiture ! Dès son apparition, le look de la nouvelle sportive de Citroën laisse sceptique, et évidemment, le carnet des commandes ne se remplit pas…
Autre problème de cette BX 4TC, une qualité de montage laissant clairement à désirer. A l’époque, c’est la société Heuliez, spécialisée dans les petites séries Citroën, qui est chargée du travail. On est là dans ce qu’il convient d’appeler de l’artisanat, et si, au final, 200 exemplaires sont bien produits et présentés à l’homologation, certains ne sont pas totalement terminés, tandis que d’autres ne roulent tout simplement pas. Et accessoirement, le projet a pris une année de retard !
Sur la scène sportive, il faut attendre le Rallye Monte-Carlo 1986 pour voir débouler les Citroën 4TC Groupe B de Jean-Claude Andruet et Philippe Wambergue. Rapidement contraintes à l’abandon. En Suède, deuxième manche du championnat, Andruet arrache la 6ème place finale… mais derrière des Audi de type Groupe A, moins performantes. Après une longue pause, la BX est de retour au Rallye de l’Acropole, en Grèce. Trois exemplaires sont alignés, pour trois abandons rapides ! Face à un tel désastre, et comme les jours de la réglementation Groupe B sont comptés suite à de tragiques accidents, le management de Citroën décide d’arrêter les frais. La carrière de la BX 4TC Groupe B a donc été météorique, ascendant catastrophique…
Et le modèle de route, dans tout ça ? Avec sa mécanique 4 cylindres turbo de 2,2 litres et une puissance annoncée de 200 chevaux pour 1280 kilos, les performances sont prometteuses. Mais à l’époque, pour se porter acquéreur d’une BX 4TC, il faut débourser l’équivalent de 70.000 euros ! Soit le prix… d’une Porsche !
Résultat : on ne se bouscule pas au portillon, d’autant que le comportement de l’auto est de type… compliqué ! Quant à la finition, relevant du bricolage, elle était catastrophique.
Conclusion : sur les 200 exemplaires construits par Citroën, seuls 86 ont été vendus ! Et les autres, direz-vous ? Que sont-ils donc devenus ? Le constructeur a décidé de les détruire ou de les désosser ! Toujours plus fort : afin d’éviter les problèmes, Citroën a même voulu racheter les autos vendues, afin de les faire disparaître ! Un épisode assez cocasse de l’histoire automobile, indigne de la marque française…
Le seul point positif de cette histoire, c’est que la Citroën BX 4TC est devenue un collector. Au look disgracieux, certes, mais un collector tout de même. Dont le prix de vente ne cesse de gonfler ! Des montants que seuls des acharnés de la marque aux chevrons sont prêts à débourser. (Vincent Franssen)