C’est l’histoire d’un double problème destiné à offrir une solution commune à deux marques allemandes tout simplement incontournables. A commencer par Volkswagen, qui, à la fin des années ’60, est en quête d’une voiture capable de succéder à la belle Karmann Ghia. Pendant ce temps, chez Porsche, on cherche à renouer avec une sportive abordable pour succéder à la 356 et compléter une offre emmenée par l’icône 911. Heinz Nordhoff et Ferry Porsche ont alors envisagé une collaboration afin de produire une voiture étant le fruit du savoir-faire technique de Porsche, et bénéficiant de la force de frappe commerciale de VW…
Très rapidement, Volkswagen et Porsche s’entendent sur le concept de ce qui va devenir la 914 : une biplace à tendance sportive, avec répartition idéale des masses grâce à un moteur en position centrale-arrière. L’affaire semblait bien lancée, mais le décès de Nordhoff, en 1968, allait obliger Ferry Porsche à entamer de nouvelles négociations. Qui aboutissaient à la création d’une société spécifique, VW-Porsche, assurant la commercialisation de la 914 en Europe. Le sigle VW n’allait par contre pas être repris aux Etats-Unis, où la 914 était clairement une Porsche…
Pour ce qui est de la ligne, il fallait que la 914 soit à la fois VW et Porsche. Pas simple… C’est donc un bureau de style externe, Gugelot Design, qui s’est chargé d’une ligne qui n’a pas toujours fait l’unanimité, mais qui a fini par entrer dans les mœurs.
Mécaniquement, deux versions étaient d’emblée prévues : un 4 cylindres d’origine Volkswagen pour ce qui allait devenir la 914-4, soit le modèle que vous avez sous les yeux, et un 6 cylindres plus cossu, d’origine Porsche, pour la 914-6. C’est le désormais bien connu carrossier indépendant Karmann qui était chargé de fabriquer les 914-4, tandis que Porsche équipait les 914-6 sur ses propres lignes de production, déjà utilisées pour la 911.
Vous l’avez compris : avec la 914, on a en fait affaire à deux voitures différentes. Avec une version 4 cylindres assimilée à Volkswagen, comme l’indiquait la carte grise mentionnant une VW Type 47 ! La mécanique 4 cylindres utilisée pour l’occasion était totalement nouvelle, et même historique, puisqu’il s’agissait du premier moteur à injection produit par la marque allemande. Sa cylindrée était de 1700cc pour une puissance de 80 chevaux. Des données permettant d’atteindre les 100 km/h en 13 secondes, et de pousser jusqu’à 177 km/h en pointe. Quant à la 914-6, elle allait recevoir le bloc de la Porsche 911 T, riche de 110 chevaux.
Avec à peine plus de 900 kilos sur la bascule, la 914, qu’elle soit 4 ou 6, se distinguait par un rapport poids-puissance tout simplement exceptionnel. Sur la route, la tenue de cap de cette petite sportive s’est rapidement révélée exemplaire. Et pour un roadster à deux places, au look sportif, le confort était plus qu’acceptable.
Malgré ces qualités, le succès commercial de la 914 a été mitigé. Surtout sur le sol européen. Alors qu’aux Etats-Unis, la diffusion était plus large. Au total, 115.000 914-4 ont été produites entre 1969 et 1976, contre 3500 exemplaires équipés du moteur 6 cylindres Porsche. De quoi néanmoins en faire à l’époque la voiture à moteur central la plus vendue au monde !
En fait, l’échec commercial relatif de la 914 trouve son origine dans la double appellation VW-Porsche. Il aurait tout simplement mieux valu que cette voiture soit une Volkswagen ou une Porsche, mais pas les deux. Pour une question d’image avant tout. On peut d’ailleurs constater que Porsche a bien retenu la leçon, puisque par la suite, plus aucun modèle n’a été associé, même partiellement, à un autre constructeur.
Il n’empêche, au fil des décennies, la 914, désormais davantage associée à Porsche qu’à VW, a vu sa cote augmenter. Au point d’être désormais recherchée par les inconditionnels de la marque, et parfois encore utilisée en compétition, comme ce fut le cas au début de la décennie ’70, avec un certain succès, d’ailleurs… (Vincent Franssen)