44% de cancers en moins ont été diagnostiqués en Belgique lors de la première vague en avril dernier de la pandémie de covid 19. Depuis, des efforts de rattrapage ont été effectués mais les conséquences sont dramatiques dans le traitement précoce de la maladie. L’OMS, l’organisation mondiale de la santé, craint même une pandémie de cancer. Au CHR Verviers, les médecins alertent sur la nécessité pour les patients de consulter et de venir à leurs rendez-vous médicaux.
La porte du CHR Verviers est toujours restée ouverte pour les patients atteints d’un cancer. Même au plus fort de la pandémie de covid-19, les équipes de soignants du centre hospitalier verviétois se sont décarcassés pour maintenir coûte que coûte leur prise en charge. Pourtant, le Registre du Cancer annonce 44% de diagnostics de cancers en moins en Belgique lors de la première vague de la pandémie en avril dernier. Il n’y a pas eu bien sûr une chute du nombre de cancers mais des milliers d’entre eux n’ont pas été détectés.
"C’est vrai que nous avons été confronté à beaucoup de diagnostics extrêmement tardifs chez des gens qui étaient déjà métastatiques ou avec des maladies particulièrement avancées, signale Gaëtan Vanstraelen, chef de service adjoint Hémato-oncologie au CHR Verviers. On sait que dans ces cas de figure-là, la prise en charge thérapeutique, elle est plus délicate, plus difficile à gérer parce que le pronostic dépend de la masse tumorale de départ".
En raison du covid-19, l’organisation des soins de tout l’hôpital s’est vu bouleversé, surtout durant la première vague. Le personnel soignant faisant face pour la première fois à cette pandémie.
"Malgré toute la bonne volonté qu’il y a à gérer le patient hémato-oncologique, il faut qu’il y ait des acteurs et que ces acteurs soient disponibles. Or, surtout durant la première vague, mais également durant la seconde vague, les acteurs étaient moins disponibles. Ils étaient sur deux fronts. On a été aussi nous-mêmes victimes du coronavirus. On a été confronté à des effectifs réduits, ça c’est une première chose, explique l’hématologue Gaëtan Vanstraelen. Néanmoins, en matière de diagnostic, surtout durant la deuxième vague, tous les services ont bien fonctionné. Le problème c’est que les patients ne voulaient pas venir à l’hôpital et que, toujours au jour d’aujourd’hui, j’ai énormément de patients qui refusent de venir en consultation".
Immunodéprimés et donc faisant partie de la population à risques, certains personnes atteintes du cancer redoutaient d’attraper le virus. Mais d’une manière générale, le contexte actuel n’encourage pas les patients à se rendre à l’hôpital.
"On a pu constater qu’une partie de la population qui se présenterait aux urgences n’osait pas se présenter (...). On a aussi des gens qui ont eu peur de contacter leur médecin traitant, qui ont banalisé certains symptômes, qui se sont dit que le covid était prioritaire, que les médecins traitants étaient débordés... Ce sont aussi les messages qu’ils ont pu recevoir et qui ont fait que ils ont certainement laissé traîner une symptomatologie à bas bruits, là où, en temps normal, ils auraient peut-être consulté et, du coup, pu être détectés plus tôt", détaille Séverine Closset, chef de service à l’Unité psychologique au CHR Verviers.
"C’est un message qu’il faut vraiment faire passer: il faut impérativement que les patients viennent à l’hôpital pour se faire diagnostiquer mais aussi pour se faire suivre et prendre en charge de manière adéquate", insiste Gaëtan Vanstraelen.
L’hématologue verviétois plaide aussi pour une politique de soins davantage axée sur la prévention et le dépistage du cancer plutôt que sur des traitements coûteux. (Au.M)