La restauration du Grand Théâtre de Verviers oui, mais pas à n’importe quel prix? Le débat a fait rage lundi soir au conseil communal. Si le projet en lui-même ne souffre d’aucune discussion, le prix total de la rénovation du Grand Théâtre inquiète, par contre, l’opposition. La rénovation coûtera beaucoup plus chère que prévue. On parle désormais d’une somme de 45 millions d’euros, suite à l’inflation et à l’augmentation du prix des matériaux.
L’inflation générale, l’augmentation du coût des matériaux et du coût de l’énergie ne sont pas sans conséquences sur les projets en cours à Verviers.
La rénovation du Grand Théâtre, à l’identique du bâtiment existant et avec une extension à l’arrière de celui-ci, coûtera en effet beaucoup plus chère que prévue. Si tout le monde s’accorde sur le projet en lui-même et la nécessité de restaurer le Grand Théâtre, son financement pose question.
"On ne remet pas en cause l’attachement au projet mais cet attachement ne doit pas rendre aveugle. Cela réveille quand même certaines craintes. Ma volonté est qu’on mesure l’impact de ce projet sur les finances communales. Il est question d’un crédit sur 30 ans, il y aura des charges de transfert et de fonctionnement, tout ça n’est pas encore précis", réagit Freddy Breuwer, conseiller communal MR à Verviers.
En moins d’un an, suite à la hausse des prix, l’estimation du coût du chantier est passée de 33 à 45 millions d’euros. Une modification budgétaire votée par la majorité et par le PP au conseil communal lundi soir. "Je crains qu’on arrive à un coût de réalisation qui dépasse les 50 millions d’euros. Je pense qu’il est impératif que, d’ici l’attribution du marché prévue fin décembre, on fasse deux choses : on doit d’abord assurer un meilleur financement au projet, un co-financement, que les pouvoirs subsidiants revoient leur intervention à la hausse, qu’on sollicite peut-être aussi la conférence des bourgmestres, les autres communes et, ensuite, on doit également maitriser les coûts. Par rapport à ces deux aspects là, je n’ai pas encore de réponse satisfaisante", regrette Freddy Breuwer.
Si on retire les subsides, la Ville devra emprunter près de 25 millions d’euros à rembourser en 30 ans. Du côté des groupes d’opposition Ecolo et PTB, on se montre très inquiet.
"C’est un projet qui demande 25 millions à la Ville de Verviers. On a très peur que ça devienne vite 30 millions. Un endettement futur, ça va être certain. Or il y a plein d’autres projets intéressants à Verviers, il ne faudrait pas qu’on arrive dans des situations où le Grand Théâtre prend tout l’argent et empêche d’autres projets essentiels à Verviers", répond Jean-Sébastien Mahu, conseiller communal Ecolo à Verviers.
"La Ville n’a pas les moyens financiers. Si on lui demande de payer, il existe 3 options : soit elle ne va pas le faire mais ça c’est impossible car on a besoin de ce projet, soit elle va effectivement devoir mettre de nouvelles taxes or les gens ne savent plus payer, soit elle va mettre un prix d’entrée au théâtre très élevé qui fera en sorte que ce ne sera plus un théâtre populaire, où on fait la fête de l’école ou du conservatoire. On va se retrouver avec un théâtre que plus aucun Verviétois ne pourra se payer. Pour le PTB, c’est impensable. C’est pour cela qu’on veut que la Région Wallonne et la Communauté Française aident la Ville à faire face à cette augmentation des prix. Malheureusement, pour le moment, on a aucun signe à ce niveau-là et on ne trouve pas la Ville très proactive pour aller chercher du soutien", lâche László Schonbrodt, conseiller communal PTB à Verviers.
Face aux craintes de l’opposition, la Ville se veut rassurante. "Quand on fait un budget, on doit mettre les montants suffisants pour pouvoir attribuer. Comme on veut attribuer cette année sinon les offres risquent de ne plus être valables, on a prévu un montant qu’on estime suffisant mais ce sera peut-être en dessous. Ici, c’est une estimation sur base des offres rentrées. Après, vous savez, dans tous les chantiers, il y a parfois des révisions. Ca dépendra de la conjoncture", répond Alexandre Loffet, échevin des finances et actuellement bourgmestre faisant fonction de Verviers. Et d’ajouter : "L’endettement, il était prévu. On avait droit à s’endetter à hauteur de X. Et forcément, ça va consommer une plus grande part de l’endettement tel qu’il était prévu. Donc ça n’augmente pas l’endettement de la Ville mais ça restreint notre capacité à faire d’autres dossiers. De toute façon, ça ne sert à rien de venir hurler en disant que la Ville sera en cessation de paiement, c’est tout à fait faux. Nous avons encore de la marge dans la balise d’emprunt, c’est-à-dire ce que nous avons le droit d’emprunter sur une mandature. Par contre, comme le projet va coûter beaucoup plus cher, il va consommer beaucoup plus de notre capacité d’emprunt et donc nous saurons réaliser moins de projets."
La Ville ajoute qu’elle va demander aux pouvoirs subsidiants de revoir à la hausse leur intervention financière pour préserver ce bâtiment repris au Patrimoine exceptionnel de Wallonie.
Renaud Collette