Garder Sophie Lambert et Hasan Aydin au collège communal de Verviers, tout en proposant le poste de Bourgmestre à Jean-François Istasse... Pour le PS, ce serait possible. En effet, ils auraient trouvé une faille dans le code de démocratie locale qui permettrait à Sophie Lambert et Hasan Aydin de refuser le mayorat au profit de Jean-François Istasse, tout en gardant leur place au collège. Pour cela, il faudrait que l’entièreté du collège démissionne pour repartir à zéro. Cette façon de procéder a déjà eu lieu du côté de Charleroi, où une situation politique inextricable avait été solutionnée par cette manœuvre.
Muriel Targnion : "C’est tout à fait anti-démocratique !"
Est-ce une solution viable pour permettre à la politique verviétoise d’avancer à nouveau ? Muriel Targnion, actuelle bourgmestre de Verviers, est très claire lorsqu’on lui pose la question : "Non ! Imaginez-vous que le PS va contourner une loi, qui plus est une loi qui a été mise sur la table par un parlementaire socialiste... C’est tout à fait anti-démocratique. Ils magouillent pour placer Jean-François Istasse comme bourgmestre, alors que cette loi a justement été créée pour éviter de pouvoir placer qui on veut à la tête d’une commune, comme c’était le cas avant. Devient bourgmestre la personne qui recueille le plus de voix de préférence sur la liste la plus forte de la majorité. "
Selon l’actuelle bourgmestre, le PS a proposé l’écharpe à Jean-François Istasse, s’il acceptait de lâcher Muriel Targnion dans sa proposition de nouvelle majorité. Un poste d’échevin aurait également été proposé à Didier Nyssen s’il faisait de même. "Le PS magouille, car ils se rendent compte qu’ils ont fait trop de promesses qu’ils ne peuvent pas tenir. Ils ont promis des postes à beaucoup de monde pour m’affaiblir et maintenant, ils ne peuvent même pas tenir leurs engagements", affirme Muriel Targnion avec un demi-sourire dans la voix.
"Et puis pourquoi ne pas vouloir de Sophie Lambert comme bourgmestre ? Elle est échevine depuis des années et a fait du bon travail. Pourquoi veulent-ils absolument de Jean-François Istasse qui a fait 500 voix aux dernières élections ? La raison, c’est cette promesse qu’ils lui ont faite. Ils créent une majorité de toute pièce en plaçant des gens qui ne s’entendront pas une fois à leur fonction. Verviers ne mérite pas ça", juge la bourgmestre évincée du PS la semaine passée.
"Le plus important, c’est de bien se rendre compte que ce sont des magouilles et que c’est anti-démocratique. Si la tutelle et le conseil d’Etat acceptent ça, c’est déjà une chose incompréhensible... Si des partis comme Ecolo, le cdH ou le Nouveau Verviers acceptent de suivre ce genre de magouilles, alors qu’ils se revendiquent comme démocrates, c’est à plus rien y comprendre", estime-t-elle.
Hajib El Hajjaji (Ecolo) : "Il est important de respecter les codes de la démocratie."
Du côté d’Ecolo, la réponse est claire. "Il est important de respecter les codes de la démocratie. Nous sommes pour le respect des règles et du droit. Les intéressés doivent être respectés", répond Hajib El Hajjaji, le chef de groupe Ecolo au conseil communal de Verviers.
Cécile Ozer (cdH) : "Pas à nous de choisir qui sera bourgmestre."
Quant au cdH, depuis hier, ils sont 4 (et non plus 2) à avoir rejoint le cartel composé du MR, du Nouveau Verviers et du conseiller indépendant Bernard Piron. Ils sont donc incontournables pour constituer une nouvelle majorité et gouverner Verviers. "Ce n’est pas à nous de choisir qui sera bourgmestre, mais le cdH ne participera à aucune motion qui permettrait de ne pas respecter la démocratie et la légitimité des voix électorales", indique Cécile Ozer. Autant dire que pour le cdH, le fait de contourner la loi comme le PS envisage peut-être de le faire n’est absolument pas envisageable.
Laszlo Schoonbroodt (PTB) : "Nous sommes impatient de connaître le fond."
Quant au PTB, le discours est un peu différent. "Ce que nous voulons savoir, c’est ce qui va se passer à Verviers et pas qui va prendre les décisions. La situation est grave à Verviers. Voici plusieurs semaines que les prises de décisions sont à l’arrêt alors que les Verviétois ont besoin de décisions claires et sociales pour les aider dans cette période. Ce sont des conflits entre des personnes, il n’y a aucun fond derrière tout ça. Nous sommes impatients de connaître le fond et les plans qui vont être mis en place pour aider les Verviétois", explique Laszlo Schoonbroodt, le chef de file du PTB verviétois.
Le MR et Bernard Piron n’ont quant à eux pas répondu à nos appels en temps et en heure. On peut cependant supposer que l’avis du cdH est partagé par l’entièreté du groupe des 15 qu’ils composent ensemble. En effet, ils se sont engagés à tracer leur chemin ensemble pour Verviers. Si un des partis qui compose le cartel n’est pas d’accord, il serait donc logique que les autres s’accordent.
Jean-François Chefneux (Nouveau Verviers) : "C’est inenvisageable avec le collège communal actuel"
Preuve en est avec la réaction de Jean-François Chefneux, le chef de file du Nouveau Verviers. "Je suis dubitatif quant à la faisabilité de ce procédé avec le collège actuel. Cela impliquerait la démission successive de tous les membres du collège communal à commencer par Muriel Targnion. C’est inenvisageable avec le collège communal actuel", pense l’échevin de la Culture. "J’aimerais qu’on reste attentif au message que ce genre de bricolage renvoie à la population", conclut-il.
Au PS : "Les vérifications sont en cours, mais cela semble jouable."
Une source proche des négociations qui se joue actuellement au PS nous indique ceci : "Les vérifications sont en cours, mais cela semble jouable de garder Sophie Lambert et Hasan Aydin au collège communal, tout en proposant à Jean-François Istasse le statut de bourgmestre. Cependant, je ne peux pas encore expliquer en détail le procédé juridique qui va être utilisé."
Quoi qu’il en soit, il semble que les négociations avancent en interne et c’est une bonne nouvelle pour les citoyens verviétois.
Une solution impossible ?
Il semblerait que la solution exposée en long et en large ci-dessus soit impossible, car elle demanderait la démission de Muriel Targnion qui a déjà affirmé à notre micro ne pas vouloir démissionner. Une motion de méfiance individuelle ou collective serait donc la seule voie pour la démettre de ses fonctions, mais est-ce que tout le monde acceptera de signer cette motion ? Si oui, sous quelles conditions ?
Vous comprendrez que la situation politique verviétoise ne s’arrête pas aux négociations internes au PS. Même si Sylvia Belly indique aujourd’hui sur son compte Facebook qu’elle restera au PS, Muriel Targnion garde tout de même le soutien de Laurie Maréchal et d’Alexandre Loffet.
C’est du côté du groupe des 15 qu’il faut se tourner, car avec une telle formation, ils sont incontournables pour créer une majorité. Aujourd’hui, c’est le cartel qui a les clés des négociations et pas le PS. Reste à savoir si les socialistes, d’un coup de baguette magique, arriveront à renverser la balance. (PJ)