Lundi, c’est le grand jour pour la politique verviétoise. Depuis quelques mois, les relations sont explosives entre différents élus, ce qui ne permet pas à la ville d’avancer efficacement dans son programme. C’est en utilisant une motion de méfiance mixte qu’une nouvelle majorité devrait prendre les commandes lundi. L’avocat et ancien bâtonnier verviétois Jules Voisin a décidé de critiquer ce procédé au sein d’une lettre ouverte adressée aux élus.
Ce jeudi, Muriel Targnion a présidé son possible dernier collège communal en tant que bourgmestre de Verviers. Lundi prochain, une motion de méfiance mixte sera votée. Celle-ci reprend une motion de méfiance collective contre le collège communal et 3 motions de méfiance individuelle contre Muriel Targnion, Hasan Aydin et Sophie Lambert.
Si le vote se déroule comme prévu, ce serait Jean-François Istasse qui deviendrait bourgmestre. Un tour de passe-passe antidémocratique selon l’avocat et ancien bâtonnier verviétois Jules Voisin. Ce dernier a donc décidé d’écrire une lettre ouverte aux élus verviétois.
Une lettre ouverte sans concession
Au sein de cette lettre ouverte, il appelle les élus à ne pas signer les motions ce lundi. S’ils signent malgré tout, il considère que Muriel Targnion devrait saisir le Conseil d’État pour invalider ce qu’il considère comme un jeu politique.
Reste à voir si cette lettre ouverte aura une conséquence sur le vote de lundi. Jules Voisin avoue ne rien attendre comme conséquence. Il souhaitait juste mettre les élus face à leurs responsabilités avant un vote qu’il considère comme anti-démocratique. (P.J.)
La lettre ouverte de Jules Voisin
"Pendant plusieurs mois, de façon récurrente, la presse s’est fait l’écho des difficultés relationnelles qui semblaient exister entre le Collège et le Conseil communal de Verviers, d’une part, et le CPAS, d’autre part.
Les « dérapages » furent étalés au grand jour.
Pour régler certains différends, qui avaient pour objet la légalité même d’actes posés par le CPAS, le Ministre de tutelle fut même amené à intervenir.
Tous les destinataires de la présente lettre ont alors partagé le même constat : il convenait de rétablir des relations harmonieuses afin que la gestion de la Ville ne soit pas impactée par l’ambiance délétère induite par de tels conflits.
Tous ensemble, vous avez identifié l’origine des problèmes et vous avez, tous ensemble, réfléchi à la meilleure façon de les régler.
Dans la mesure où vous avez constaté que quelques membres de la majorité ne partageaient pas nécessairement votre analyse, vous avez alors songé à consolider cette majorité.
C’est ainsi que les membres de la majorité qui dirigeait la Ville depuis les dernières élections ont accepté la main tendue par le CdH. qui, dans un esprit constructif, a offert de contribuer à assainir la situation en rejoignant la majorité en place.
Tous ensemble, majorité existante et CdH., vous êtes arrivés à un accord que vous avez coulé dans une « motion de méfiance constructive collective et adoption d’un nouveau pacte de majorité » que vous avez déposée le 7 juillet 2020 en mains de Madame la Directrice générale afin qu’elle soit soumise au vote et adoptée par le Conseil communal.
L’adoption de cette motion ne devait poser aucun problème puisque vous étiez 20 à l’avoir signée et que vous représentiez la majorité des membres de vos formations politiques respectives.
Tous les problèmes semblaient donc réglés
C’est alors qu’une instance, totalement étrangère à la Ville de Verviers, est intervenue et a fait savoir que l’accord que vous aviez conclu ne lui convenait pas !
Il s’agit du Parti socialiste qui décida de mettre l’USC et la Fédération Socialiste de Verviers « sous tutelle »
Ce n’était évidemment pas la Ville de Verviers et ses organes représentatifs qui étaient ainsi mis « sous tutelle » et cette intervention extérieure n’était donc pas de nature à affecter, de quelque façon que ce soit, l’accord que vous aviez conclu.
Vous avez donc présenté à la population, via la presse, les nouveaux partenaires constituant la nouvelle majorité.
Toutefois, quelques-uns, sous la pression de cette « tutelle » mise en place par un parti politique (rappelons que cette « tutelle » est sans pouvoir aucun…) n’ont pas hésité à renier leur parole et leur signature !
Aujourd’hui, c’est quasiment l’ensemble des signataires qui s’apprêtent à suivre ce lamentable exemple…
Le signal donné à l’électeur, au citoyen, est absolument catastrophique puisqu’il revient à dire que, pour un élu, la parole donnée et sa signature sont sans valeur…
Qui, parmi vos électeurs ou vos concitoyens, pourrait agir de la même façon sans risquer de devoir en rendre compte devant les tribunaux… ?
Leurs élus seraient-ils en quelque sorte « au-dessus des lois » ?
Je fais appel à votre sens de l’honneur, au respect que vous devez avoir de votre signature, au devoir de loyauté qui doit vous guider, afin que vous ne poursuiviez pas dans une voie qui ne peut que vous déshonorer et contribuer à creuser le fossé entre les citoyens et le « monde politique ».
En l’espèce, ce revirement aboutirait à une conséquence d’autant plus inacceptable que deux personnes, aux côtés desquelles vous vous étiez engagés (et qui n’auraient évidemment pas agi si vous ne les aviez pas assurés de votre soutien loyal), à savoir la bourgmestre et un échevin, risquent bien de perdre le mandat que les électeurs leur avaient donné.
Vous êtes tous des « mandataires publics ».
À cet égard,, il faut rappeler que si « mandataires » il y a, cela signifie qu’il y a aussi des « mandants ».
C’est de ces mandants, vos électeurs, que vous tenez les fonctions qui sont les vôtres et en leur nom que vous les exercez.
Pouvez-vous croire un seul instant qu’ils pourraient admettre que vous bafouiez ainsi les valeurs de loyauté, de respect de la parole et de l’engagement découlant d’une signature ?
Si vous en doutez un tant soit peu - et si vous ne pouvez vous résoudre à exécuter l’accord que vous avez librement conclu - , alors je vous demande plutôt que de commettre l’irréparable, de solliciter l’avis de vos électeurs en organisant une consultation populaire.
Ce serait sans doute la seule façon de vraiment respecter ceux qui vous ont fait confiance en leur rendant la parole et, en définitive, de sortir honorablement de cette déplorable situation tout en évitant le risque inconsidéré de voir le Conseil d’Etat sanctionner, en les déclarant nulles et de nul effet, les manœuvres que vous vous apprêtez à déployer pour contourner le but poursuivi par le Code de la Démocratie Locale.
Je veux encore croire que vous agirez pour assurer le respect de ces valeurs essentielles (loyauté, respect de la parole donnée et des engagements souscrits), contribuant de la sorte à rétablir le lien de confiance qui doit absolument exister entre les électeurs et leurs représentants.
Avec nos sentiments les meilleurs,
Jules VOISIN
Avocat- ancien Bâtonnier
mais surtout
citoyen viscéralement attaché aux valeurs éthiques"