Les couacs de la justice sont légion, mais celui qui s’est déroulé ce mardi devant le tribunal correctionnel de Verviers est assez invraisemblable. Il devait se tenir ce jour là un très gros procès, pour lequel trois audiences entières avaient été réservées bien à l’avance.
Il faut dire qu’il concernait pas moins de 15 prévenus, donc cinq détenus, et aussi un grand nombre de parties civiles, 29 au total, impliqués dan un énorme trafic de faux crédits pour l’achat de voitures. Le processus était assez simple : on convainc des quidams, en général en marge de la société et bien entendu en échange d’un payement qu’on promettait alléchant, de faire des demandes de crédit avec de fausses fiches de paye, en majorité comme profs. Ces intermédiaires prenaient possession du véhicule, qui était immédiatement pris en charge par les commanditaires, et disparaissaient dans la nature, sans doute vers des horizons lointains. Et les hommes de paille se retrouvaient gros jean comme devant, sans voir la couleur d’un seul centime et ayant un gros crédit à payer.
Un dossier de 4000 pages
C’est donc avec un dossier gros de 4.000 pages que le juge Dominique André devait commencer à examiner devant le tribunal correctionnel. Devait, car l’audience a vite tourné en eau de boudin, en constatant l’absence du principal inculpé, pourtant détenu, un certain Nourridine, un poids lourd de la criminalité puisque déjà condamné à Verviers de peines de 5, 2 et 4 ans de prison ! Pas de sa faute, car il voulait être présent à ce procès, mais de celle de la police fédérale, qu a carrément refusé de transférer le dit Nourridine de sa prison de Jamioux, dans le Hainaut, sous prétexte d’un manque d’effectifs. Ce qui a suscité l’ire du ministère public, Sébastien Lelotte, qui a fulminé contre l’irresponsabilité de la police fédérale : « Que voulez-vous faire, on ne peut rien dire à ces gens là qui font comme bon leur semble, sans tenir compte des impératifs d’un tribunal. C’est aberrant ! »
Et le juge André, constatant l’impossibilité de commencer le procès sans son principal chef d’orchestre de l’affaire concernant tant de gens, qui en plus avait manifesté sa volonté de se défendre en personne, a bien dû se résoudre à comprimer l’affaire sur les deux audiences prévues à cet effet, qui promettent d’être longuettes. Au grand dam des nombreux avocats, magistrats, prévenus et public présent, qui se sont retrouvés devant une matinée vidée de toute substance.