On se souviendra de cette fameuse affaire où un couple était accusé de viol, torture, séquestration pendant trois jours dans une cave, traitements dégradants, tentative de mariage forcé, coups et blessures, tentative d’étranglement, tout cela sur leur fille âgée de 15 ans ! C’étaient les terribles accusations portées à l’égard d’un couple de réfugiés syriens devant le tribunal correctionnel de Verviers. S’ils niaient, cela n’avait pas empêché le ministère public de réclamer 5 et 4 ans de prison. Mais contre toute attente, le tribunal avait estimé qu’il pouvait y avoir un doute dans cette histoire, et avait donc acquitté les prévenus. Mais le Parquet a fait appel de cette décision surprenante.
Rappel des faits : Un couple de Syriens de 39 et 43 ans a fui un pays en guerre pour la Belgique en 2016, après avoir subi deux ans l’autorité de Daesh. Ils ont quatre enfants, dont l’aînée Sarah (prénom d’emprunt), âgée de 15 ans, semble être leur souffre-douleur. En 2021, cette dernière s’enfuit du domicile familial par la fenêtre et pieds nus pour se réfugier chez une voisine. C’est le début d’un dossier qui se révèlera effarant. Car ce que Sarah raconte aux enquêteurs saisis de l’affaire est tout simplement horrible.
La principale scène qu’elle décrit est inimaginable. Elle se déroule en 2020, lors du confinement, après qu’une amie de Sarah a publié sur les réseaux sociaux une photo d’elle pourtant tout à fait convenable. Pour la punir, Sarah se trouve séquestrée pendant trois jours sans boire ni manger dans une cave, ligotée et frappée avec un câble par son père. Mais le pire, c’est que celui-ci lui frotte la poitrine avec un piment sectionné, et va jusqu’à le lui introduire dans le sexe, et ce à plusieurs reprises !
Le reste n’est pas triste non plus. Sarah se plaint d’avoir été la bonniche de la famille, d’être régulièrement insultée, traitée de pute, qu’on lui crachait dessus, qu’elle ne pouvait pas manger avec le reste de la famille, etc.
Rien que des mensonges et inventions
Face à ces terribles accusations, la première réaction du père, qui se présente comme un musulman modéré, avait été de dire : « Elle ment ! C’est une voisine qui l’a montée contre nous. » Et de nier tout châtiment corporel. Il y a pourtant des témoins qui disent qu’il était dur avec ses enfants, un qui dit qu’il l’a vu donner des gifles à Sarah, et une de ses amies dire qu’elle a constaté des traces de liens aux poignets. « Tout cela n’est que mensonges » avait-il affirmé.
Quant à la mère, accusée de n’avoir rien fait pour éviter les exactions commises sur sa fille, elle était sur la même longueur d’ondes. « Tout cela n’est que mensonges. La scène de la cave ? Elle invente. » Et pour ce qui est de du mariage forcé, avec un homme de 28 ans alors qu’elle n’avait que 15 ans ? Là aussi, il démentait : « Ils se sont rencontrés en dehors de nous, une cérémonie de fiançailles, qui est un prélude au mariage, a eu lieu, avec imam et documents signés, mais c’est moi qui ai stoppé le processus en constatant que le mec était instable. Sarah était contente, car le type était un musulman trop radical »
Un scénario peu crédible
Mme Herman, ministère public avait tenté de déconstruire tout cet argumentaire peu crédible. Le mariage forcé ? Ce sont les parents qui ont présenté l’homme à Sarah, qui n’en voulait pas. Elle a fini par accepter pour fuir ses parents. Mais c’est le CPAS qui est intervenu pour rompre ce mariage illégal. Quant au reste, quel intérêt aurait eu Sarah a raconter ces histoires avec un discours cohérent et des détails difficilement inventables ? Elle est au contraire décrite comme une élève modèle, calme et timide. Elle réclamait 5 ans de prison pour le père, et 4 ans pour la mère, pas impliquée dans le viol.
Pour Me Ahriga, la scène de la cave est peu crédible, et les propos de Sarah exagérés ou inventés. Il n’y a aucun constat, aucune preuve, seulement les dires de la jeune femme. Il demandait donc l’acquittement du couple au bénéfice du doute.
Un raisonnement parfaitement suivi par le tribunal, qui a donc acquitté le couple pour ces raisons. Mais le Parquet a la possibilité de faire appel de cette décision, écrivions nous. Ce qu’il a fait, très logiquement. Affaire à suivre, donc !